PORTRAIT :
BA Nassou Traoré
« Une
commandante » ….restauratrice
Trônant au milieu de son restaurant, au milieu de la
dizaine d’employés c’est elle la « commandante ». Elle connait, tout
le monde et tout le monde lui parle. Ba Nassou, gère depuis vingt ans son
restaurant à la rue 30 de la médina, un des nombreux quartiers populeux de la
Médina à Dakar.
Partie de son Mali natal, Ba Nassou vint retrouver
son mari à Dakar dans les années 90. Deux ans plu tard, ce dernier décédait,
laissant entre ces mains leur nouveau né
d’à peine quelques mois. Seul sans soutien et sans réelle famille à Dakar, elle
se lance dans la restauration avec le peu d’économie que lui avait laissé son
mécanicien de mari. Battante, cette première d’une fratrie de cinq enfants, sait
se débrouiller. La cause elle a très vite joué le rôle de mère auprès de ses
frères après le décès prématuré de leur mère, quant elle n’avait que 12 ans.
Petit à petit donc, elle parvint à se faire une réputation dans le quartier de
la médina grâce à ces talents culinaires. Celle qui raffole du « tô »
plat bambara fait à base de mil ou de maïs, excelle dans la cuisson des
recettes sénégalaise, Tchèp djène, tchèp yap, souboukandja Mafé et même le
kaldou, qui est plat typiquement casamançais. Les clients à l’instar de Ibra
Diouf ne tarissent pas d’éloges quand il s’agit d’apprécier la cuisine de Ba
Nassou « Cela fait dix ans que je
vis à la médina, le seul restaurant qui a pu me fidéliser c’est celui de Ba
Nassou, à cause de la qualité e du goût des plats qu’on y sert ». Celle qu’on surnomme la « commandante » du fait de son
intransigeance et son autorité à la limite dictatoriale, se révèle une tout
autre personne, quand elle voit errer des enfants talibés dans les rues à la
recherche de pitance. Pour celle qui a connu une enfance difficile cette pitié envers ces jeunes, se transforme chaque
jour en distribution de plats et restes aux talibés qui y rodent à longueur de
journée.
Souvent, et toujours avec le mot juste il lui arrive
de calmer certains clients qui trouvent ces talibés
envahissants.
Le sobriquet de « commandante » qui lui
colle à la peau ne la gêne nullement. Elle se plait souvent à se l’entendre
dire. Cela rappelle à Ba Nassou Traoré ses aïeux, Tiéba et Babemba qui ont
d’une main de fer gouverner sur l’immense royaume Bambara de Ségou. Cette région située à quelques 300 kilomètre
de Bamako, est là où elle tire sa passion pour la cuisine. Ba Nassou, se
souvient, nostalgique de cette période, où la seule satisfaction de la femme
était que son mari apprécie son plat. « Au début c’est par souci de me faire de l’argent que je me suis mis à
ce que je savais faire le plus, c'est-à-dire la restauration ». Mais elle
reconnait qu’avec le temps elle a plus
été motivée par ces nombreuses filles auxquels elle offrait un emploi. « Savoir que j’aidais des filles à être
indépendante financièrement m’a le plus
passionnée » dit elle. Si elle à une satisfaction dans la vie, c’est
de « voir que des filles qu’elle a
initié son aujourd’hui propriétaire de restaurant. » se réjouit elle.
Mais celles-ci ne retiennent pas toujours de bons souvenirs de leur passage
sous son magistère. Pour Mariame Guèye aujourd’hui propriétaire de restaurant « Ba Nassou n’est pas toujours d’un commerce facile. Autant elle
peut être attachante, qu’elle peut être insupportable. Son penchant pour la
supériorité sur celle de ses employés demeure son plus grand défaut »,
se souvient elle. Si Ba Nassou se reconnait volontiers ce caractère, elle n’y
voit rien de méprisant. Car selon elle, descendant de vigoureux rois, il ne
peut y avoir deux « commandants » dans un même bateau. « Et jusqu’à preuve du contraire je demeure la
seule patronne de MON restaurant »
crache sec la « commande ».
Férue des cérémonies de mariages, baptêmes, comme
toute « djandjigui » (femme
imposante) elle ne se fait pas prier pour prendre part à ces manifestations. Ce
sont des moments privilégiés, au cours
des quels elle distribue des billets de
banques aux griots qui flattent son égo en lui rappelant sa « noble » descendance. Entre deux discours, il suffit que l’on
énonce l’anecdote, selon laquelle, elle a un jour par mégarde
plongé les poissons dans la sauce sans les avoir lavés et encore moins nettoyés et le grand rire qui s’en suit est
si contagieux que tout le restaurant s’en trouve contaminer.
Mohamed DAGNOKO
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